Sa rage était sans bornes. Elle ne savait plus quoi faire, plus quoi dire, plus ou aller. Elle ne voulait pas accepter la dure vérité. Sa rage était à son maximum, elle éructait. En passant rapidement devant les murs immaculés des couloirs, elle pensa qu'ils n'allaient pas rester blancs très longtemps. Elle le cherchait, l'appelait, hurlait son nom. Il n'était pas là, ne répondait pas. Il se cachait. Sa chemise d'hôpital lui fouettait les cuisses au fur et à mesure que le rythme de sa course effrénée s'emballa. C'était impossible. C'était tout bonnement impossible qu'elle ait à supporter une telle perte. Elle avait pleuré pendant trois longs jours, s'était lamentée, avait refusé de parler à quiconque. Elle ne voulait voir personne, si ce n'est son fils, son petit enfant. À présent, elle ne le cherchait plus. Elle cherchait la vengeance, elle cherchait à faire du mal autant qu'elle souffrait sur l'instant. Elle erra, pendant trente longues minutes, le long des couloirs identiques de l'hôpital. Elle erra, sans vie, les joues rouges et pleines de larmes. Ses cheveux étaient sales, sa mine était horrible. On aurait dit un vrai revenant. Enfin, elle arriva à son but. Une petite alcôve, vide de mondes, où l'attendait seulement le meurtrier de son fils. Furtivement, le regard de Phyn croisa celui de son mari. C'en était trop pour elle. Elle ne pouvait accepter qu'il souffrait autant qu'elle, si ce n'est plus. Tout comme elle, il avait perdu son enfant mais il devait avoir des regrets, une montagne de regret. Mais la jeune femme ne voulait pas accepter cela, elle ne voulait pas que quelqu'un d'autre souffre de la mort de son bébé, il était sien, rien qu'à elle, elle pleurait déjà son départ, elle ne voulait pas en plus partager la douleur que cela engendrait. Ses larmes coulèrent de plus belle. Elle courra vers son mari. L'espace d'un instant, un éclair dans ses yeux, un faible éclair bleu azur, sembla croire que Phyn allait ses jeta dans ses bras, qu'ils allaient pouvoir tomber ensemble, pour mieux se relever. Mais Phyn n'avait aucune envie de partager un moment de tendresse avec son mari. Elle se jeta sur lui, telle une lionne protégeant ses petits. Ses ongles commencèrent alors à lacérer. Elle ne voyait plus rien, son regard obscurci par ses larmes et sa haine, ne voyait plus le visage de l'homme qu'elle avait à présent le désir de tuer. Il se débattait et finalement, il réussit à la stopper. Il était plus fort qu'elle physiquement mais, pas psychologiquement, il avait connu trop d'horreurs, à la guerre, pour ne pas décupler la souffrance qu'il ressentait à présent pas cent ou mille. Il avait le visage en cent et, c'est tout ce que Phyn réussit à voir avant qu'on ne la remmène dans sa chambre et qu'on la plonge encore, dans un profond sommeil.

Alors que sa mère venait juste d'annoncer à Phyn que son fils n'avait aps survécut au tragique accident dont la petite famille avait été victime, on donna à la jeune femme un choix. Aujourd'hui encore, elle ne savait pas si on lui avait donné réellement un choix à faire ou si on lui avait juste accordé une énième raison de souffrir. Alors qu'elle venait tout juste de perdre sa seule raison de vivre, on avait simplement placé un papier entre ses mains, lui demandant si elle préférait qu'on incinère ou qu'on enterre son tout petit. Sur le moment, elle n'avait pas su quoi choisir. Et finalement, son choix s'était porté sur le feu. Elle voulait ensuite qu'on enterre ses cendres, elle voulait être là et, dix jours après sa crise de nerfs, elle se dit que ce choix avait été des plus judicieux. Elle était vêtue la plus simplement possible. Elle ne possédait pas de vêtements noirs, elle qui était si gaie d'habitude. Alors, sa mère était allée lui acheter une robe noire, simple mais jolie, sans fioritures.