I just want to feel safe in my own skin
I just want to be happy again
crédits/tumblr ~ dido

L’air frais du matin se faufile par la fenêtre entre ouverte du petit salon de l’appartement que tu occupes en colocation avec ton meilleur ami depuis plusieurs mois déjà. Les premiers rayons du soleil bien qu’encore un peu timide pointent le bout de leur nez, jusqu’à ce refléter contre les carreaux de la grande baie vitrée. Assise en tailleur derrière la petite table basse en chêne où jonchent tout un tas de paperasse destinés à la fois au statut des factures, du domaine professionnel et du travail à l’université, tes prunelles continuent de scruter minutieusement la double page d’un livre aussi gros qu’un dictionnaire. En y songeant tu remerciais l’existence bienfaisante des bibliothèques municipales qui regorgeaient d’ouvrages on ne peut plus utiles à tes travaux scolaires comme pour ton usage personnel. Lunette de vue sur le bout du nez, stylo à bille dans la main gauche tu couches très vite sur papier les bribes d’idées destinées à venir à bout de ce résumé. La veille au soir, tu avais été un brin trop vivace pour des festivités entre amis et à cette heure-ci tu payais ton retard en tentant de remettre à jour. Des deux, il avait été décidé d’un commun accord que tu t’occupais de rédiger les factures communes à l’entretien du logement. Une tâche qui ne te dérangeait pas le moins du monde. Reportant ton attention sur ton écriture, tu peux sentir le pelage doux de ton chat te frôler tout en te chatouillant au passage. Le petit félin grimpe avec une aisance toute innée sur la table avant de s’allonger au coin, sa queue s’agitant doucement. Un sourire instinctif et mélancolique se dessine sur ton visage et tu secoues la tête. Au moment de te replonger dans tes affaires, la porte d’entrée claque en un bruit sourd suivit de ton appellation. « Saige ! ». La voix de Theo te parvient depuis l’entrée et tu te penses légèrement sur le côté pour tenter de l’entrevoir mais rien n’y fait. Ton meilleur ami revient les bras chargés de deux cafés et d’un sachet de viennoiseries toutes typiquement françaises. C’est là que tu remercias Theo de si bien te connaitre. « Tu es sortie de si bonne heure pour aller chercher le petit déjeuner ? ». Lui demandes-tu tout en te levant en sa direction pour venir pendre les deux tasses de caféines en plastiques qui menacent d’embrasser le sol d’un moment à l’autre. Le jeune homme soupire doucement avant de s’écrouler sur l’un des tabourets de la cuisine, passant sur son visage. Les traits de ce dernier sont fatigués, mais sa bonne humeur est toujours vivace.  « Non j’avais une course à faire alors j’en ai profité pour faire un petit détour à la boulangerie. Je me suis dit que participer à ta prise de kilos était une bonne idée. ».  Te dit-il en rigolant tout en mordant le premier dans une brioche sucrée. Tu l’observes alors qu’il mord dans sa viennoiserie, ce qui t’arrache un rire amusé. « On se demande qui de nous eux prendra le plus de masse, hm ? Espèce de goinfre ! ». Répliques-tu d’une intonation taquine tout en désignant la brioche d’un bref signe de tête. Theo pose ses yeux azuréens sur cette dernière prenant mesure de tes paroles. Derechef, tel un seul homme un rire complice et malicieux vous gagne comme les gamins que vous étiez autrefois. A l’image de vos parents respectifs, vous perpétuez une amitié qui a su faire de vous des individus soudés et proches quoi qu’il arrive. « Au fait, le type que tu as tenté de fuir hier soir au bar ce n’était pas Peter ? ». T’interroge ton colocataire alors que tu portes ta tasse de caféine à tes lèvres. Un léger silence s’ensuit mais tu hausses  finalement les épaules comme pour émettre un certain détachement et une réponse positive. Tu n’avais guère envie de parler du passé, pas plus que hier qu’aujourd’hui. Pour autant, tu sais que cette réponse ne sera pas suffisante pour Theo. Il s’inquiétait pour toi comme l’inverse était de mise. « Je l’ai aperçu une peu plus tôt à l’université, je ne sais pas ce qu’il cherchait et encore moins la raison mais il est bien de retour au bercail on dirait … ». Glisses-tu d’une manière tout à fait détachée. Ton comparse s’accoude contre le rebord du comptoir de la cuisine, tout en te regardant sérieusement. « Moi je crois que c’est toi qu’il cherche. ». Tu fronces légèrement les sourcils, en espérant que ton ami ce soit trompé.

But since I've opened my eyes
And with you there's no disguise
So I could open up my mind
crédits/tumblr ~ kravitz

Tout en marchant, le téléphone portable collé à l’oreille tu essais quelque peu de faire patienter ton frère ainé. A l’autre bout du fil, il ne cesse de te répéter de te méfier de la gent masculine et de leurs mauvaises intentions à ton égard. Dans ses préventions – aux bonnes mœurs – tu ne pouvais de retrouver ce demi-frère à la fois protecteur et bienveillant qui veille sur sa cadette comme aurait dû le faire votre père – à son égard – voilà plusieurs années en arrière. Un antérieur sur lequel vous ne conversez que très peu, préférant laisser tout cela derrière vous. Dwight commence à perdre patience et se gêne guère pour te le communiquer. « Désolée je devais à tout prix envoyé un mail de confirmation pour le boulot, donc tu disais … ». Souffles-tu quelque que essoufflé par ta marche alors que tu presses le pas en direction du studio photographique où tu as rendez-vous avec Eggie. « Encore une fois, tu ne m’as pas écouté. ». Son mécontentement est compréhensible, tu te mets à sa place aussi naturellement que cela t’es possible. C’est dans ta nature et tu sais que les sentiments de ton frère partent d’une bonne attention. Ces derniers temps, tu étais tellement prise par le boulot et les études et lui par ses obligations que vous ne voyez plus aussi souvent qu’au début. Tu décides de te faire pardonner en lui proposant de déjeuner avec lui demain midi, une proposition qui adoucit légèrement sa colère du moment avant qu’il ne raccroche. Finalement, il ne t’a pas confié ce qui lui semblait urgent. Tu fronces les sourcils, en essayant de chercher mais bien vite le temps joue contre toi et tu te mets à courir pour rejoindre Eggie au point de rendez-vous. Il serait certainement le premier à t’attendre mais contrairement à lui tu n’empruntais que les transports en communs.  De l’autre côté du passage clouté, tu peux l’apercevoir main dans les poches, lunette de soleil sur son nez faisant les cent pas devant la devanture du studio. Dès qu’il te remarque, l’expression qui se peint sur les traits de son visage sont à la fois satisfaits et impatients, rien de bien changeant à l’accoutumée. « Tu sais que si je te ne connaissais pas si bien, je te demanderai une explication à ton retard. ». Son assertion est teintée d’un certain agacement mais aussi d’une déclaration sérieuse que tu ressens de manière personnelle. Tu fronces le bout de ton nez de manière grimaçante avant de lui donner un petit coup de coude. « Ne fais pas ta mauvaise tête pour une fois, tu veux ! Je ne t’ai pas fait attendre comme les moines l’abbé … ». Déclares-tu en ricanant d’un sourire bon enfant alors qu’à son tour il te couve d’une expression bien réprobatrice. Entre vous, il y a toujours eu comme une tension mystérieuse et non avouée, très métaphorique tel un chat et une souris. L’intensité de ses pupilles à la fois sombres et malicieuses te procure une impression toute personnelle comme si tout en silence, les mots n’avaient pas besoin d’exister entre vous. Il te draguait quelques fois aussi ouvertement qu’il te saluait mais tu le lui rendais bien elle taquinant. Ta franchise directe et naturelle semblait ne pas le déranger, au contraire il ne faisait que te pousser davantage dans tes retranchements. Il esquisse un sourire de loup au coin de ses lèvres avant de sortir les mains de ses proches tout en relevant ses lunettes sur le sommet de sa tête. Dans sa main, il tient une enveloppe. « J’ai finalement obtenu ce fameux contrat pour le concert. Je dois couvrir l’évènement ce week end … et je veux que tu viennes avec moi sur les lieux du moins si tu es libre bien entendu … ». Te dit-il tout en plongeant son regard sur toi. Submergé par un élan d’excitation rien qu’à l’idée de participer à ce projet, tu le serres dans tes bras. Les effluves de son parfum chatouillant soudainement tes narines. Une pensée qui te ramène agréablement mais brutalement sur terre, tes joues piquant un fard.  Tu t’apprêtes à te reculer quelque peu gêné de cette proximité – de plus en plus fréquente ces derniers temps – mais au même moment Eggie pose une main dans ton dos. Décidément, plus le temps passe plus la situation devient compliquée.